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Cassation "FR" 19/9/2024 : EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - les délais (rétrocession, recours)

     



19
septembre
2024

Cour de cassation
Pourvoi n° 23-20.053
Troisième chambre civile - Formation de section

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2024:C300497

Titres et sommaires
EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE

L'action judiciaire en rétrocession, régie par l'article L. 421-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, doit être engagée dans le délai de deux mois à compter de la réception de la notification de la décision administrative de rejet prévue à l'article R. 421-6 du même code, et dans le délai de trente ans à compter de l'ordonnance d'expropriation


Texte de la décision
Entête
CIV. 3

MF



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 septembre 2024




Rejet


Mme TEILLER, président



Arrêt n° 497 FS-B

Pourvoi n° X 23-20.053




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 SEPTEMBRE 2024

1°/ M. [B] [O], domicilié [Adresse 1],

2°/ M. [Y] [O], domicilié [Adresse 4],

3°/ Mme [M] [O], domiciliée [Adresse 2],

ont formé le pourvoi n° X 23-20.053 contre l'arrêt rendu le 27 juin 2023 par la cour d'appel de Caen (1re chambre civile), dans le litige les opposant à la commune de [Localité 5], représentée par son maire en exercice, domicilié en cette qualité en l'Hôtel de ville, [Adresse 3], défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Rat, conseiller référendaire, les observations de la SCP Guérin-Gougeon, avocat de MM. [B] et [Y] [O] et de Mme [M] [O], de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la commune de [Localité 5], et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 2 juillet 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Rat, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller faisant fonction de doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, Brillet, conseillers, Mme Djikpa, M. Zedda, Mmes Brun, Vernimmen, conseillers référendaires, et Mme Letourneur, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Exposé du litige
Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 27 juin 2023), par ordonnance du 15 mars 1988, le juge de l'expropriation du département du Calvados a déclaré expropriées, au profit de la commune de [Localité 5] (la commune), les parcelles appartenant à MM. [B] et [Y] [O] ainsi qu'à Mme [M] [O] (les consorts [O]).

2. Soutenant que le terrain n'avait reçu que partiellement la destination prévue par l'acte déclaratif d'utilité publique, les consorts [O] ont, par une lettre recommandée du 26 février 2018, demandé au maire de la commune la rétrocession de leurs parcelles.

3. La commune n'ayant pas donné suite à cette demande, les consorts [O] l'ont assignée en rétrocession le 27 juin 2018.

Moyens
Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. Les consorts [O] font grief à l'arrêt de les déclarer irrecevables en leur action aux fins de rétrocession, pour cause de prescription, alors :

« 1°/ que si les immeubles expropriés n'ont pas reçu, dans le délai de cinq ans à compter de l'ordonnance d'expropriation, la destination prévue ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens propriétaires ou leurs ayants droit à titre universel peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans à compter de l'ordonnance d'expropriation ; que cette demande de rétrocession doit être adressée à l'expropriant et n'est soumise à aucune exigence formelle ; que la décision prise par l'expropriant à la suite de cette demande peut faire l'objet d'un recours devant le tribunal judiciaire dans un délai de deux mois à compter de la réception de sa notification ; qu'en déclarant irrecevable comme prescrite l'action formée par les consorts [O] devant le tribunal judiciaire de Caen aux fins de rétrocession de leurs parcelles, après avoir pourtant constaté que l'ordonnance d'expropriation datait du 15 mars 1988 et que les consorts [O] avaient adressé leur demande de rétrocession à la commune de [Localité 5], expropriante, le 26 février 2018, soit avant l'expiration du délai de trente ans, et avant de contester la décision implicite de rejet de cette dernière dans les deux mois de son intervention, la cour d'appel a violé les articles L. 421-1 et R. 421-6 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

2°/ que si les immeubles expropriés n'ont pas reçu, dans le délai de cinq ans à compter de l'ordonnance d'expropriation, la destination prévue ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens propriétaires ou leurs ayants droit à titre universel peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans à compter de l'ordonnance d'expropriation ; que ce délai de trente ans est suspendu par l'envoi d'une demande de rétrocession préalable à l'expropriant ; qu'en déclarant irrecevable comme prescrite l'action formée par les consorts [O] devant le tribunal judiciaire de Caen aux fins de rétrocession de leurs parcelles, motif pris de ce que l'assignation en justice de l'autorité expropriante aurait dû intervenir dans le délai de trente ans à compter de l'ordonnance d'expropriation et qu'elle est intervenue postérieurement, peu important qu'une demande préalable de rétrocession ait été adressée à l'expropriante dans ce délai de trente ans, la cour d'appel a violé les articles L. 421-1 et R. 421-6 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. »

Motivation
Réponse de la Cour

5. Selon l'article L. 421-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, si les immeubles expropriés n'ont pas reçu, dans le délai de cinq ans à compter de l'ordonnance d'expropriation, la destination prévue ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens propriétaires ou leurs ayants droit à titre universel peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans à compter de l'ordonnance d'expropriation, à moins que ne soit requise une nouvelle déclaration d'utilité publique.

6. L'article R. 421-6 du même code précise que le recours devant le tribunal judiciaire compétent pour connaître des litiges nés de la mise en œuvre du droit prévu à l'article L. 421-1, doit être introduit, à peine de déchéance, dans le délai de deux mois à compter de la réception de la notification de la décision administrative de rejet, ce dont il résulte que cette action doit être précédée d'une demande adressée à l'expropriant.

7. En premier lieu, la demande préalable de rétrocession adressée à l'autorité expropriante ne constituant pas un recours gracieux ou hiérarchique contre une décision administrative, au sens de l'article L. 411-2 du code des relations entre le public et l'administration, ce texte ne lui est pas applicable.

8. En second lieu, ne constituant pas une demande en justice au sens de l'article 2241 du code civil, elle n'est pas interruptive du délai de prescription trentenaire.

9. Il en résulte que l'action judiciaire en rétrocession doit être engagée dans le délai de deux mois à compter de la réception de la notification de la décision administrative de rejet et dans le délai de trente ans à compter de l'ordonnance d'expropriation.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

Dispositif
PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne MM. [B] et [Y] [O] ainsi que Mme [M] [O] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille vingt-quatre.



الجمعة 27 سبتمبر 2024
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