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Cour de cassation "FR" 2024" : En l'absence de saisine d'une juridiction marocaine, la compétence du juge français procède du texte précité qui désigne le bâtonnier du barreau auquel l'avocat est inscrit pour connaître de la contestation d'honoraires

     



19
septembre
2024
Cour de cassation
Pourvoi n° 22-24.870
Deuxième chambre civile - Formation restreinte hors RNSM/NA

Publié au Bulletin

ECLI:FR:CCASS:2024:C200806

Titres et sommaires
AVOCAT

Texte de la décision
Entête
CIV. 2

LM



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 19 septembre 2024




Cassation


Mme MARTINEL, président



Arrêt n° 806 F-B

Pourvoi n° N 22-24.870





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 19 SEPTEMBRE 2024


M. [C] [S] [Z], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 22-24.870 contre l'arrêt rendu le 7 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 9), dans le litige l'opposant à M. [I] [N], domicilié [Adresse 2] (Maroc), pris en qualité de syndic de la société Financière Hatt, société anonyme de droit marocain, défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de la SARL Gury & Maitre, avocat de M. [S] [Z], et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 25 juin 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Pradel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Exposé du litige
Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué, rendu par la juridiction du premier président d'une cour d'appel (Paris, 7 novembre 2022), M. [N], syndic à la liquidation judiciaire de la société Financière Hatt (la société Hatt) a confié la défense des intérêts de cette société à M. [Z] (l'avocat) devant les juridictions marocaines, aux fins de contestation de diverses créances et d'une action en comblement de passif à l'encontre de dirigeants sociaux.

2. Après avoir adressé à son client une mise en demeure le 31 octobre 2017, l'avocat a saisi, le 18 janvier 2018, le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris d'une demande de fixation des honoraires dus par son client.

3. Par décision du 7 septembre 2018, le bâtonnier s'est déclaré compétent et a fixé à une certaine somme les honoraires dus par M. [N], ès qualité.

4. Le 3 octobre 2018, M. [N] a interjeté appel à l'encontre de cette décision. In limine litis et à titre principal, il a soulevé l'incompétence du bâtonnier de Paris pour connaître de ce litige.

Motivation
Examen du moyen

Sur le moyen relevé d'office :

5. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 :

6. Selon ce texte, les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires d'avocats ne peuvent être réglées qu'en recourant à la procédure prévue aux articles 175 à 179 de ce décret.

7. Il résulte de ces textes que les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires d'avocat sont soumises successivement au bâtonnier de l'ordre des avocats auquel appartient l'avocat qui y dispose de son cabinet principal, puis au premier président de la cour d'appel dans le ressort duquel l'Ordre est établi.

8. En l'absence de saisine d'une juridiction marocaine, la compétence du juge français procède du texte précité qui désigne le bâtonnier du barreau auquel l'avocat est inscrit pour connaître de la contestation d'honoraires, peu important que la mission de l'avocat se rattache de manière caractérisée au Maroc.

9. Pour retenir l'incompétence du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris pour statuer sur la demande de fixation des honoraires de l'avocat, l'arrêt constate qu'aucun des courriers de M. [V] des 3 et 6 décembre 2014 demandant à M. [Z] de l'assister dans les différentes procédures ne se réfèrent à la loi française, ni à la qualité d'avocat français de l'avocat, ceux-ci étant adressés en langue arabe, à son adresse à [Localité 3], dont il n'est pas contesté qu'elle correspondait à son lieu d'exercice professionnel au Maroc, où il était inscrit comme avocat au barreau de Casablanca et était agréé auprès de la Cour de cassation marocaine.

10. L'arrêt relève qu'aucune des missions confiées aux termes de ces deux lettres n'a été accomplie en France, toutes l'ayant été exclusivement sur le sol marocain, devant les juridictions de l'Etat du Maroc.

11. L'arrêt ajoute que l'ensemble des documents soumis au juge de l'honoraire ont originellement été établis en langue arabe et chiffrés par référence à l'unité monétaire en cours au Maroc.

12. En statuant ainsi, en se référant à tort à l'absence de lien de rattachement caractérisé du litige avec la juridiction française pour se déclarer incompétente, alors qu'aucune juridiction marocaine n'était saisie du litige d'honoraires et qu'elle constatait que l'avocat était inscrit au barreau de Paris, la juridiction du premier président a violé le texte susvisé.

Dispositif
PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne M. [N] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille vingt-quatre.



السبت 21 سبتمبر 2024
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