Annuellement, le patrimoine de l’Etat (domaine privé) lui rapporte près de 2 milliards de dirhams. Les produits de cession représentent environ 60% et les produits de location 40%. Ce sont d’ailleurs ces derniers qui sont injectés dans le budget général de l’Etat. Le reste, soit 1,2 milliard de dirhams, alimente le Fonds de remploi domanial qui finance, entre autres, les opérations de reconstitution de la réserve foncière. Pour 2013, il est prévu de faire un effort supplémentaire pour rapporter 500 MDH de plus que le niveau actuel des recettes, pour atteindre 2,5 milliards. Certains ne manqueront pas de penser que le gouvernement a fixé cet objectif pour renflouer une partie des caisses de l’Etat. Omar Faraj, patron de la Direction des Domaines de l’Etat (DDE) du ministère des Finances ne le conçoit pas. «Nous avons un impératif qui est de mieux gérer le patrimoine de l’Etat, de mieux le valoriser et d’améliorer son rendement. Depuis des années, nous sommes plus attentifs à cette gestion active. Nous avons lancé des programmes bien avant (NDLR : que la situation ne se détériore) pour mieux le valoriser, améliorer les recettes et le recouvrement aussi». Parmi les efforts consentis, il y a lieu de citer des actions comme la normalisation et la professionnalisation des méthodes d’évaluation pour la détermination de la valeur du patrimoine, le développement d’une approche concertée avec les services de l’urbanisme à l’occasion de l’élaboration des plans d’aménagement et l’adoption de nouvelles approches de mobilisation du domaine privé de l’Etat. Concernant ces dernières, il s’agit par exemple de nouvelles opérations qui consistent en des prises de participation dans des projets pour mieux maîtriser le patrimoine et le rentabiliser efficacement. C’est avec la création de l’Université Internationale de Rabat ou avec l’OCP dans le cadre de l’aménagement et le développement du nouveau Pôle Urbain de Mazagan que cette approche a démarré. De quoi s’agit-il ? Avec l’OCP Group par exemple, la Direction des Domaines a créé une société foncière, où elle détient 49%. Son apport à la société est en nature, à savoir le terrain sur lequel le projet va se développer. L’OCP se charge de la gestion du projet. Les gains dégagés sont alors partagés entre les deux actionnaires. C’est un partenariat public-public qui permet à la DDE de proposer, certes un foncier à un coût raisonnable, mais dégager du cash pour reconstituer, entre autres, les réserves foncières de l’Etat. Pour l’instant, ce genre d’opération se limite à des partenaires publics. «Avec le privé, l’option reste envisageable. Théoriquement, rien ne l’en empêche. Mais nous souhaitons d’abord rôder le partenariat public-public », convient Omar Faraj.
Régularisation des arriérés
Par ailleurs, la direction des Domaines mène d’autres chantiers pour dénicher de nouvelles niches de recettes. Celles qui, aujourd’hui, sont les plus probables à exploiter concernent, entre autres, la revalorisation des contrats de location, la rémunération des services rendus (expropriation, portage, …) et l’amélioration des capacités de recouvrement. Au sujet de la revalorisation des contrats de location, le directeur de la DDE souligne que le système change. Le procédé des enchères publiques pour la location des terres agricoles est par exemple enterré. « On arrête les contrats des terrains agricoles qui dépassent 5 hectares en zone irriguée ou 10 hectares en zone bour. Ils sont intégrés dans le cadre du plan Maroc Vert. L’objectif est de les mettre en valeur. Dans le cadre du partenariat public-privé, les locations qui se font maintenant sur de longues durées, permettent aux investisseurs d’avoir plus de visibilité sur leur projet. Ce n’est pas comme s’ils louaient pour une durée de deux ou trois ans. Cela permet aussi d’améliorer le revenu locatif, mais ce n’est pas notre priorité. Le gain est important pour toute la collectivité puisque les terrains sont mieux valorisés ». Concernant le recouvrement, le ministère des Finances a décidé de renforcer ses actions pour mieux recouvrer ses créances.
Les arriérés, qui étaient estimés à 1,2 milliard de dirhams il y a deux ou trois ans, ont baissé à 800 millions. Un système d’information a été mis en place pour mieux gérer la situation. L’ambition de la DDE est de recouvrer chaque année 200 MDH et d’apurer la situation comptable de certaines créances non recouvrables. C’est le cas par exemple de ces 100.000 hectares encore intégrés dans le patrimoine de l’Etat alors qu’ils ont déjà été distribués dans le cadre de la réforme agraire. « Mais tant que l’agriculteur n’a pas encore régularisé sa situation, ces terrains resteront inscrits dans notre base de données », lance Omar Faraj. Ce contexte dure depuis les années 1970. Et il y a bien des raisons. Une disposition légale prévoit des pénalités pour non régularisation. «Quand le fellah décide d’apurer son solde, il constate qu’il doit régler des arriérés plus importants que le montant principal. Grâce à un arrêté conjoint entre les départements des Finances, de l’Intérieur et de l’Agriculture, nous essayons de solder ces dossiers en abandonnant les arriérés pour que les agriculteurs régularisent leur situation», explique le directeur de la DDE. Le montant des arriérés s’élève a peu près à 300 MDH, dont 60 millions de pénalités. Ce sont là quelques actions parmi d’autres que la direction des Domaines tente de mettre en place pour une gestion plus active du patrimoine de l’Etat évalué à 1,5 million d’hectares. 7% se trouvent dans les zones urbaines et 25% en suburbain. C’est très peu. La réserve foncière autour des grandes villes se réduit, et pour cause. « Le disponible dans et autour des grandes métropoles a tendance à se raréfier dans la mesure où l’essentiel du foncier « propre » a été mobilisé lors de la dernière décennie », indique-t-on auprès de la direction des Domaines. Et c’est donc entre autres pour cette raison que des réflexions sont menées, et des décisions sont prises pour repenser aux conditions et les modalités de la reconstitution de la réserve foncière.
Pour le patron de la DDE, cela passe d’abord par une meilleure maîtrise et une connaissance plus fine du disponible réel. « Cela suppose également un cadre de concertation et de planification large afin de définir les besoins globaux en foncier pour les équipements et services publics et pour les investissements productifs ». La mise en place d’un système d’information fin et fiable ainsi que la détermination d’un modèle économique du financement de la reconstitution de la réserve (et sa gestion), sont alors les priorités de la Direction des Domaines à court et moyen termes.
500 Mrds
Le domaine privé de l’Etat s’élève selon les premières estimations à près de 1,57 million d’hectares (contre environ 800.000
en 2005) pour une valorisation de 500 milliards de dirhams.
141.000 hectares
Près de 141.000 hectares ont été mobilisés au cours de la dernière décennie pour le développement économique et social du pays.
Plus de la moitié du foncier concentrée dans 4 régions
C’est surprenant de savoir que 57% du patrimoine privé de l’Etat (qui est aliénable, contrairement au domaine public, au domaine forestier, aux terrains collectifs et au patrimoine des collectivités territoriales) se concentrent dans quatre régions administratives : Marrakech, Laâyoune, Gharb et Guelmim. Et plus encore, 68% de ce domaine sont situés en milieu rural, 25% dans le périmètre suburbain et 7% dans le périmètre urbain. « Le fait que plus des deux tiers du domaine privé de l’Etat se retrouvent en zone rurale se comprend du fait que dans la structure du patrimoine, beaucoup de terrains ont été récupérés dans le cadre de la marocanisation », indique-t-on à la Direction des Domaines. 11% de ce domaine privé sont constitués de terrains bâtis et le reste de terrains nus. Il se compose par ailleurs d’immeubles construits affectés aux services publics et d’un parc de logements et de petits commerces. Concernant la situation juridique, 52% sont immatriculés, 39% en cours d’immatriculation (objet de réquisition) et 9% non immatriculés.
Dysfonctionnements dans la mobilisation des immeubles
Au cours de la dernière décennie, la DDE a acquis 9700 hectares au profit de différents départements ministériels pour la réalisation d’équipements publics administratifs et socio-éducatifs faisant ainsi monter le patrimoine foncier affecté aux ministères à 30.000 hectares. Cinq d’entre eux concentrent 90% de ce patrimoine. Il s’agit des départements de l’Agriculture, de l’Education Nationale, de l’Equipement, de la Justice et de l’Intérieur. La direction des Domaines relève néanmoins des dysfonctionnements dans la mobilisation des immeubles pour répondre aux besoins des administrations. Elle cite, entre autres, l’absence de normes d’allocation du foncier pour la réalisation des équipements publics, le surdimensionnement du parc immobilier dans certains cas par rapport aux besoins réels, l’utilisation partielle d’immeubles par les administrations affectataires etc.
« Pour mieux encadrer le dispositif en la matière et initier une gestion active, les listes des immeubles affectés ont été adressées, pour confrontation, aux départements concernés dans l’optique d’harmoniser les bases de données, de s’assurer de l’utilisation effective des immeubles affectés et d’entamer une gestion plus active de ce portefeuille», explique Omar Faraj, directeur de la DDE.
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