La réforme du marché des capitaux est relancée après plusieurs années d’attente. Quatre projets de loi relatifs au marché financier sont en effet passés en deuxième phase de promulgation. Du secrétariat général du gouvernement, ils ont été transmis au conseil du gouvernement pour approbation, avant de passer à la discussion et au vote au niveau du Parlement. Il s’agit du projet relatif à la mise en place du marché à terme, à la transformation du CDVM en Autorité marocaine des marchés des capitaux (AMMC), aux informations exigées des personnes faisant appel public à l’épargne et au prêt de titres. Ces projets, qui ont été depuis longtemps dans le pipe, sont remis sur la table à un moment où le marché boursier est gagné par une atonie sans précédent, où les transactions se font rares et où les investisseurs, particuliers et institutionnels, expriment un besoin grandissant de diversifier leurs moyens d’intervention sur la place. Aussi, un recadrage tant des compétences du régulateur que des informations financières à communiquer par les émetteurs sont des chantiers sur lesquels il était nécessaire de s’atteler.
Un marché à terme sur instruments financiers pour plus de liquidité
Le projet de loi sur le marché à terme a pour objet d’introduire de nouveaux instruments financiers dans le circuit des transactions au même titre que les valeurs mobilières traditionnelles. Ce marché fonctionne selon le même principe d’achat et de vente d’actions, de produits de taux et de devises. Sauf que le règlement s’effectue au terme de la période convenue entre l’acquéreur et le cédant.
Tout l’avantage de ce marché réside dans l’engagement des deux parties à la réalisation à terme de l’opération selon des conditions fixées à l’avance. Cela permet donc une prévention contre le risque de fluctuation des actifs. Parmi les instruments à mettre en place, on trouve les «futures» qui sont des contrats d’achat ou de vente ferme d’un actif à une date future et à un prix fixé à l’avance. Contrairement à ces derniers, les «options» donnent à leurs acquéreurs le droit et non l’obligation d’acheter ou de vendre une quantité d’un actif à un prix déterminé moyennant une prime. Les «swaps», quant à eux, sont des produits permettant l’échange de produits de taux ou de devises.
La mise en place de ces produits doit être accompagnée d’un cadre organisationnel et réglementaire spécifique. En effet, une société gestionnaire du marché à terme sera créée et aura pour vocation de concevoir ces différents instruments en fonction de la liquidité des actifs sous-jacents et des besoins des investisseurs. Par ailleurs, afin d’assurer le fonctionnement et le bon déroulement des opérations, une Chambre de compensation sera également mise en place. Elle sera chargée de la compensation et de la livraison des actifs et du règlement des espèces. Cela induira un contrôle de la sécurité des systèmes de compensation et des aspects opérationnels du marché. Il sera exercé conjointement par Bank Al-Maghrib et le CDVM.
Le CDVM devient AMMC avec des prérogatives élargies
Pour ce qui est de la transformation du CDVM, le gendarme du marché sera rebaptisé «Autorité marocaine des marché des capitaux». Cette appellation n’est pas anodine puisque les prérogatives de l’autorité seront renforcées en élargissant son champ d’intervention. En plus de la transformation d’un établissement public à une personne morale publique dotée d’une autonomie, l’AMMC ne limitera plus son contrôle aux valeurs mobilières mais comprendra le marché des capitaux dans son ensemble dont la société gestionnaire du marché à terme et de sa Chambre de compensation, les opérations de pension et certains titres de créances négociables. Autre nouveauté de ce projet de loi : désormais, c’est l’AMMC qui habilitera le contrôleur interne, le négociateur, le gestionnaire de portefeuille et l’analyste financier à exercer leurs fonctions après passage d’un examen et octroi d’une carte professionnelle.
Plus de transparence dans la communication financière
Au même titre que l’autorité qui les impose, l’information financière exigée des personnes morales qui recourent au marché fait également l’objet d’une refonte. Le projet de loi étend, d’une part, les compétences de l’AMMC en la matière et exige la communication d’informations supplémentaires de la part des entreprises faisant appel public à l’épargne (APE). Par exemple, celles-ci seront obligées non seulement de publier à la fin du premier semestre un rapport financier, mais aussi de communiquer trimestriellement leurs indicateurs d’activité et financiers. En plus, le texte de loi octroie à l’autorité du marché la possibilité de faire appel à un expert pour toute vérification du document d’information à l’occasion d’un APE.
Le dernier projet de loi est relatif au prêt de titres. Il s’agit d’un contrat par lequel seules les personnes morales soumises à l’impôt sur les sociétés, les OPCVM et les organismes de placement en capital risque peuvent emprunter des titres (valeurs mobilières, titres de créances négociables, valeurs émises par le Trésor) à un prêteur, moyennant le paiement d’une rémunération, en s’engageant à les lui restituer après une durée maximale d’une année. Cette opération offrira un double avantage. Elle permettra au prêteur d’obtenir, en plus d’une rémunération, une meilleure gestion de son portefeuille et, à l’emprunteur, de profiter des opportunités éventuellement offertes par le marché. Ce type d’opérations s’effectue par l’intermédiaire d’une banque qui se charge de la remise des titres et espèces aux deux parties. En cas de remise tardive des titres ou des espèces, ou de résiliation du contrat, le projet de loi prévoit le paiement d’indemnités ou l’arrêt d’exécution du contrat, selon les cas.